Nouvelle prospérité, le nouveau paradigme en marche
Nouvelle prospérité, le nouveau paradigme en marche
Par
Jamel
BENJEMIA
Une transformation profonde est à l’œuvre dans nos économies et nos sociétés, portée par des avancées technologiques époustouflantes. Cette dynamique redéfinit les contours de ce que l’ont pourrait appeler une nouvelle ère de prospérité.
Contrairement aux vagues précédentes, celle-ci se caractérise par une intégration toujours plus poussée de l’innovation, une prise de conscience environnementale grandissante et une mutation radicale des modes de travail.
Toutefois, cette prospérité émergente n’est pas uniforme. On remarque que certaines régions et certains secteurs connaissent un essor fulgurant, tandis que d’autres peinent à s’adapter, accentuant ainsi les disparités entre le Nord et le Sud.
Il est impératif de comprendre ces dynamiques pour saisir pleinement les opportunités qui se présentent et anticiper les défis futurs.
Les moteurs de cette prospérité sont d’une nature inédite : l’Intelligence Artificielle (IA), l’automatisation, les énergies renouvelables et les technologies vertes jouent un rôle prépondérant. L’agriculture, en particulier, doit être au cœur de cette révolution pour assurer l’autosuffisance alimentaire et garantir la souveraineté nationale.
Bien que la mondialisation suscite des critiques, elle demeure un vecteur d’échanges et de collaboration à l’échelle internationale. Pour que cette nouvelle ère de prospérité soit véritablement inclusive, il est nécessaire d’adapter nos politiques économiques et sociales afin de réduire les inégalités tout en stimulant l’innovation.
Cette époque se distingue nettement des précédentes par son insistance sur la durabilité et l’équité.
Vers la fin de la controverse
L’ancien Ministre tunisien de l’Économie, Hakim Ben Hammouda, pose une question pertinente : avons-nous besoin d’un nouvel ordre économique ou d’un nouveau modèle de développement ?
La proposition d’un nouveau modèle de développement peut sembler attrayante, mais elle soulève des interrogations légitimes : sur quels fondements serait-il construit ?
Quels en seraient les principes directeurs ? Souvent, les appels à un « nouveau modèle » manquent de pragmatisme et de réalisme, échouant à clarifier comment ce modèle pourrait être mis en œuvre dans la complexité du monde actuel.
Quant à l’idée d’un nouvel ordre économique, l’histoire nous enseigne que les tentatives de renversement ou de transformation radicale des systèmes ont souvent conduit à des périodes d’instabilité profonde. La période Ben Salah en Tunisie est une triste illustration.
Une approche plus pragmatique résiderait dans la réforme et l’adaptation du modèle existant, en mettant l’accent sur la revitalisation du « carré magique » et l’amélioration de la productivité.
La bataille pour améliorer la productivité n’est donc pas seulement un enjeu de croissance, mais un levier essentiel pour atteindre le plein emploi et stabiliser l’économie.
Pour moi, cette nouvelle prospérité doit réconcilier croissance économique et justice sociale, en s’appuyant sur des modèles qui intègrent pleinement les enjeux environnementaux et les avancées technologiques.
Cette vision est partagée par plusieurs économistes de renom.
Joseph Stiglitz, par exemple, plaide pour un capitalisme reformé qui s’appuie sur une croissance inclusive, tout en réduisant les inégalités et en intégrant les externalités environnementales. Thomas Piketty, quant à lui, insiste sur la nécessité de redistribuer les richesses pour éviter que la prospérité soit accaparée par une élite, soulignant l’importance de politiques fiscales plus progressives.
Paul Krugman partage cette perspective en soulignant le rôle crucial des politiques publiques pour soutenir la classe moyenne et atténuer les effets néfastes de la mondialisation. Enfin Mariana Mazzucato met l’accent sur l’innovation dirigée par l’autorité publique, affirmant que les gouvernements doivent jouer un rôle central dans la création de valeur, notamment en investissant dans les technologies vertes et les infrastructures sociales. Ensemble, ces économistes redessinent les contours d’une nouvelle prospérité fondée sur l’équité, la durabilité et l’innovation, offrant un cadre pour construire un avenir plus juste et plus stable.
Études de cas
En Asie, la Corée du Sud se distingue par son adoption rapide des technologies de pointe. Grâce à des investissements massifs dans la recherche et le développement, alliés à une culture profondément enracinée dans l’innovation, le pays s’est hissé au rang de leader mondial dans les secteurs des technologies de l’information, de la biotechnologie et des énergies renouvelables.
Il est frappant de rappeler qu’au début des années 1960, la Corée du Sud avait un PIB nominal par habitant de seulement 260 dollars, comparable à celui du Cameroun à l’époque.
Ce dynamisme technologique a non seulement stimulé l’économie sud-coréenne, mais a aussi significativement amélioré le niveau de vie et contribué à la réduction des inégalités sociales.
En Europe, la Suède se présente comme un modèle exemplaire de prospérité durable.
Malgré un taux de prélèvements obligatoires (impôts et cotisations sociales) atteignant 44% du PIB, le pays parvient à conjuguer une forte croissance économique avec des politiques environnementales ambitieuses.
L’engagement de la Suède en faveur des énergies renouvelables et de l’économie circulaire a non seulement permis de réduire son empreinte carbone, mais a également créé des milliers d’emplois verts. Par ailleurs, son système de protection sociale avancé assure une répartition équitable des fruits de la croissance, renforçant ainsi la cohésion sociale.
Aux États-Unis, la Silicon Valley reste l’illustration emblématique d’une prospérité née de l’innovation. Le développement fulgurant de l’industrie technologique a engendré une richesse immense, transformant la région en un centre mondial d’innovation, où des géants tels que les GAFAM (Google, Amazon, FaceBook, Apple et Microsoft), dominent aujourd’hui la scène économique mondiale. Cependant, cet exemple met également en lumière les défis liés à cette nouvelle prospérité : les inégalités de revenus s’accentuent, la gentrification s’accélère, et la dépendance à une énergie bon marché devient problématique.
La panne de courant qui a frappé la Silicon Valley en 2017, touchant 90 000 abonnés, souligne l’urgence d’une politique énergétique efficace.
Ces études de cas montrent que si la nouvelle prospérité offre des opportunités considérables, elle impose aussi la nécessité de mettre en œuvre des politiques équilibrées et inclusives.
Perspectives
En regardant vers l’avenir, plusieurs tendances suggèrent que la nouvelle prospérité continuera de se développer et de transformer notre monde. Les avancées technologiques restent le moteur principal de cette transformation.
L’essor de l’Intelligence Artificielle (IA), de la Blockchain et des technologies quantiques promet de bouleverser encore davantage nos industries et nos modes de vie.
Ces innovations ont le potentiel d’améliorer l’efficacité, de réduire les coûts et de créer de nouvelles opportunités économiques inédites.
Un des leviers essentiels pour garantir cette prospérité réside dans l’accès à une énergie abordable, tant pour les particuliers que pour les entreprises. Une politique économique véritablement keynésienne devrait encourager les particuliers à produire leur propre énergie photovoltaïque, favorisant ainsi l’autonomie énergétique, tout en réduisant les dépenses des ménages et en augmentant leur pouvoir d’achat. Pour les entreprises, un accès à une énergie moins couteuse se traduit par des coûts de production réduits, rendant leurs produits plus compétitifs sur le marché mondial.
Les gouvernements et les entreprises joueront un rôle crucial dans l’orientation de cette nouvelle ère de prospérité. Les politiques publiques devront non seulement encourager l’innovation, mais aussi veiller à ce que les fruits de cette prospérité soient équitablement répartis. Cela nécessite des investissements massifs dans l’éducation et la formation continue, afin de préparer les travailleurs aux métiers de demain.
La durabilité environnementale sera un pilier fondamental de cette prospérité. Les initiatives visant à lutter contre le changement climatique, comme la transition vers une économie à faible émission de carbone, deviendront encore plus cruciales. Les innovations dans les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique et l’économie circulaire joueront un rôle clé pour garantir un avenir durable.
Parallèlement, l’État devra renforcer la production agricole en promouvant une agriculture biologique, qui non seulement soutient l’autosuffisance alimentaire, mais constitue également la clef de voûte de la souveraineté nationale.
Adopter un plan ambitieux de lutte contre le logement insalubre, associé à une politique d’accès universel à la santé, et renforcer la prévention par un accès élargi aux soins, notamment via le dépistage précoce, contribueront à construire une société plus saine et résiliente, où la santé publique deviendra un pilier central du développement durable.
Enfin, pour que la nouvelle prospérité soit véritablement durable, elle doit bénéficier à tous. Des politiques visant à réduire les inégalités, à améliorer l’accès aux services de base et à protéger les droits des travailleurs seront essentielles pour créer une société plus juste.
En somme, la nouvelle prospérité offre des perspectives prometteuses, mais elle exige une gestion éclairée et une vision à long terme pour s’assurer qu’elle profite à l’ensemble de la société de manière équitable et durable.
Cette nouvelle prospérité représente une promesse collective où l’innovation technologique, la durabilité environnementale et l’équité sociale convergent pour créer une richesse partagée, résiliente, et respectueuse des générations futures.
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