Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

2025 : Le poids du présent, la chrysalide de l’avenir.                            

29 Décembre 2024 , Rédigé par Jamel BENJEMIA / Journal LE TEMPS 29/12/2024

2025 : Le poids du présent, la chrysalide de l’avenir.                                    
            
   Par

Jamel

BENJEMIA  

Le monde, tel un navire malmené par des tempêtes imprévues, entrevoit une accalmie fragile. Après des années marquées par des crises successives telles que la pandémie, les déséquilibres économiques et les bouleversements géopolitiques, l’économie mondiale semble se stabiliser. Pourtant cette éclaircie masque une houle profonde : celle des fractures grandissantes entre nations.

L’année 2024 a oscillé entre promesses et désenchantements. Tandis que les économies avancées retrouvent un semblant d’équilibre, les pays en développement s’enlisent dans un sable mouvant fait d’endettement, de pauvreté et d’instabilité. Cette disparité économique, exacerbée par les ravages du changement climatique et les inégalités sociales, projette une ombre menaçante sur l’horizon mondial.
Pourtant, sous cette ombre, l’espoir persiste. La Banque mondiale insiste sur la possibilité de relever ces défis, mais cela repose, à mon humble avis, sur deux piliers essentiels : la paix et la justice. Sans ces fondations, même les ambitions les plus grandes se briseront comme des vagues contre des récifs invisibles.

L’année 2025 apparaît comme un tournant historique, porteuse d’un double visage : l’espoir d’un redressement vers une prospérité plus inclusive et un contrat social renouvelé, mais aussi le danger de l’inaction face aux fractures mondiales et à l’urgence climatique. Tel un miroir, le monde reflète une réalité exigeant une réponse collective, immédiate et sincère.


Les blessures invisibles de la pauvreté
Derrière les chiffres glaçants - 700 millions de personnes vivant sous le seuil de l’extrême pauvreté - s’écrit une tragédie humaine silencieuse. Chaque statistique dissimule des regards éteints, des mains tendues et des rêves avortés. La pauvreté dépasse l’absence de moyens. Elle s’insinue dans chaque recoin de l’existence, qu’il s’agisse d’une école trop lointaine, d’un puits tari ou d’un corps affaibli faute de soins. Ce fléau tentaculaire, où l’absence d’un droit finit par effacer tous les autres, frappe plus d’un tiers des habitants des pays à faible revenu, particulièrement en Afrique subsaharienne. 
Face à cette réalité cruelle, l’espoir vacille mais ne s’éteint pas. Les 23,7 milliards de dollars mobilisés par l’Association Internationale de Développement, une branche du Groupe de la Banque Mondiale, constituent une promesse. Cependant, sans une volonté politique forte et une refonte audacieuse des structures économiques mondiales, ces efforts resteront vains. Chaque inégalité creuse un abîme, menaçant l’équilibre de notre humanité partagée.

L’ombre étouffante du changement climatique

L’année 2024 a vu la terre ployer sous les assauts incessants d’une nature en révolte : inondations dévastatrices, sécheresses implacables et cyclones violents. Mayotte, fragile perle de l’océan Indien, a récemment essuyé la furie du cyclone Chido. Jadis perçues comme des anomalies, ces catastrophes sont devenues des épisodes récurrents. Dans les régions à faible revenu, elles ne sont plus des intrusions passagères, mais un quotidien hostile. Chaque tempête menace de noyer l’espoir.
Malgré tout, une lueur persiste. Les 43 milliards de dollars mobilisés en 2024 par la Banque Mondiale pour l’action climatique incarnent une promesse. Cet effort, crucial mais insuffisant face à l’urgence. L’avenir exige une révolution des politiques et des pratiques : des stratégies audacieuses alliant résilience et sobriété carbone, mais surtout un engagement sincère envers les plus vulnérables, pour qu’ils ne soient pas engloutis par les vagues d’un dérèglement climatique qu’ils subissent bien plus qu’ils ne l’ont provoqué.


Le poids écrasant de la dette

Dans les pays en développement, la dette dépasse la froideur des chiffres pour devenir une ombre pesante, étouffant chaque tentative de progrès. À la fin de l’année 2023, elle atteignait la somme vertigineuse de 8 800 milliards de dollars, un montant abyssal qui pèse sur des épaules déjà fragiles. Ce lourd tribut ne se contente pas d’immobiliser ; il prive des millions d’enfants de bancs d’école, abandonne des malades dans les couloirs des dispensaires et transforme des rêves collectifs en mirages lointains. La dette mondiale écrase les individus bien avant de peser sur les États.
Mais derrière ce poids chiffré se cache une autre vérité, celle de l’absence cruelle d’une gouvernance mondiale juste et visionnaire. Les règles du jeu financier, écrites pour servir les intérêts des plus puissants, maintiennent ces nations dans une spirale d’étouffement. Une gestion de la dette plus transparente, telle que promue par la Banque mondiale, est une lueur dans l’obscurité, mais elle reste insuffisante.

L’heure n’est plus aux demi-mesures. Ce fardeau universel exige une réponse audacieuse qui repose sur une coopération internationale réinventée, guidée par la solidarité et l’équité. Seule une répartition plus juste des ressources et des responsabilités peut briser ces chaînes invisibles et libérer un avenir plus lumineux.


  L’héritage fragile des générations futures

Les enfants d’aujourd’hui hériteront des choix façonnés pour 2025. Pourtant pour beaucoup, leur destin semble déjà compromis, enlisé dans les lacunes du présent. Dans les régions les plus vulnérables du globe, leur avenir s’écrit sur un parchemin troué, où manquent des données essentielles, des chiffres pourtant vitaux pour bâtir des politiques éclairées. En Afrique subsaharienne, plus de la moitié des pays enregistrent moins de 40 % des naissances. L’absence de registres de naissance prive des millions d’enfants de reconnaissance officielle et de droits essentiels, les reléguant à une existence précaire, dépourvue de protection et d’opportunités.

 La Banque mondiale, consciente de ces lacunes béantes, s’efforce de combler le vide, mais son action ne peut être qu’un vœu pieux. Il revient aux États eux-mêmes de raviver cette flamme vacillante, en inscrivant la collecte de données au cœur de leurs priorités. Car sans ces fondations solides, les promesses d’un avenir meilleur resteront de fragiles illusions, emportées par les vents du désintérêt. L’urgence est là, celle de donner à chaque enfant une place dans l’histoire et une chance dans la vie.
Grâce à une politique de digitalisation ambitieuse, le Rwanda est parvenu à relever le défi crucial de l’enregistrement des naissances. Que cet exemple éclairant serve d’inspiration aux autres nations africaines.
Mais, une autre réalité vient assombrir le tableau. L’année 2024 a révélé une vérité insoutenable : la guerre à Gaza surpasse désormais les maladies comme première cause de la mortalité infantile. 
Chaque bombe, chaque tir, détruit bien plus qu’une vie ; il anéantit des générations, brise des avenirs et assombrit l’humanité tout entière.

Entre dangers et promesses 
L’année 2025 s’avance, tel un funambule suspendu entre les gouffres du danger et les cimes de l’espérance. Sur son fil fragile dansent les grands défis de notre temps : abolir la pauvreté qui ronge les âmes, apaiser un climat en furie, alléger le joug écrasant des dettes et forger des sociétés où règnent enfin l’égalité et la justice. Ces épreuves, vastes comme des océans, ne sont pourtant pas des murs infranchissables, mais des appels à réinventer le monde.

La paix et la justice, ces étoiles trop souvent voilées par les intérêts immédiats, doivent guider les décisions judicieuses. Comme l’a rappelé le Président de la Banque Mondiale Ajay Banga, « les prévisions ne sont pas gravées dans la pierre ». L’avenir est une argile malléable, façonnée par chaque résolution. En 2025, chaque choix peut devenir une brique pour combler les fractures ou un éclat qui approfondit les failles.

À l’aube de cette année décisive, l’humanité se trouve face à son propre miroir. Les épreuves qui s’amoncellent ne laissent aucune place à l’inaction : 2025 doit être l’année des décisions courageuses et des engagements concrets. La COP30, prévue au Brésil, sera l’occasion de renforcer les ambitions climatiques et d’adopter des mécanismes de financement adaptés aux pays les plus vulnérables. Parallèlement, les prochaines assemblées du G20 et des Nations Unies offriront des plateformes pour réformer la gouvernance mondiale, alléger le poids insoutenable des dettes et garantir un accès équitable aux ressources essentielles.
Le chemin est étroit, comme une crête fragile, mais il conduit, pour ceux qui oseront s’y aventurer, vers un horizon où le danger devient semence et l’espoir, récolte promise. Ce tournant est une épreuve, un test ultime de notre capacité collective à transformer les promesses en actions, à bâtir un avenir plus juste, plus humain et véritablement durable.

 

Partager cet article

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :

Commenter cet article