L’Europe selon Mario Draghi : Une vision économique à l’épreuve.
L’Europe selon Mario Draghi :
Une vision économique à l’épreuve.
Par
Jamel
BENJEMIA
Mario Draghi, ancien Président de la Banque centrale européenne (BCE) et ancien Premier ministre italien, s’impose comme une figure incontournable sur la scène économique européenne. Son engagement retentissant de 2012, où il promit de faire « tout ce qui est nécessaire » pour sauver l’euro, a marqué un tournant décisif dans la gestion des crises économiques du continent. Aujourd’hui, il propose une vision audacieuse pour l’Europe, axée sur l’intégration, l’innovation et la souveraineté économique. À travers ses réformes, Draghi ambitionne de refaçonner l’économie européenne, la rendant plus compétitive et résiliente face aux défis mondiaux. Cet article explore les principes qui sous-tendent sa philosophie économique, les propositions qu’il avance pour renforcer l’Europe et les obstacles qui jalonnent ce chemin.
Le tournant de 2012
En 2012, alors que l’euro vacillait sous le poids de la dette souveraine, menaçant l’unité européenne, Draghi, alors à la tête de la BCE, prononça des mots qui allaient changer le cours de l’histoire : « tout ce qui est nécessaire » serait fait pour préserver la monnaie unique. Cette déclaration eut un effet immédiat, apaisant les marchés financiers et insufflant une nouvelle confiance dans la capacité de l’Europe à surmonter la tempête. Elle ne fut pas un tournant pour l’euro, mais aussi pour la crédibilité de la BCE, désormais reconnue comme gardienne de la stabilité financière.
Sous la direction de Draghi, la politique monétaire de la BCE s’illustra par des mesures non conventionnelles, telles que l’assouplissement quantitatif (Quantitative Easing), qui consistait à acheter massivement des obligations souveraines afin de maintenir des taux d’intérêt bas et de stimuler l’économie. Ces interventions ont permis de stabiliser les marchés et d’éviter une spirale déflationniste, mais elles ont aussi redéfini la philosophie monétaire européenne en légitimant un rôle interventionniste de la BCE. Cela marqua un revirement de l’orthodoxie monétaire qui prévalait depuis la création de l’euro, où la lutte contre l’inflation primait souvent au détriment de la croissance.
Les critiques et les enseignements
Les politiques menées par Draghi n’ont cependant pas fait l’unanimité. Dans le Nord de l’Europe, des voix s’élevèrent, notamment en Allemagne et aux Pays-Bas, pour dénoncer l’assouplissement quantitatif, redoutant qu’il ne génère un aléa moral en réduisant la pression sur les États pour qu’ils entreprennent des réformes structurelles. Ils craignaient aussi les risques d’inflation et l’accumulation d’une dette abyssale, favorisée par des taux d’intérêt historiquement bas. Or, les craintes d’une flambée inflationniste ne sont pas concrétisées à court terme, et la stratégie de Draghi a pavé la voie à des politiques budgétaires plus interventionnistes, comme le « quoi qu’il en coûte » appliqué pendant la crise du COVID-19.
Draghi a démontré qu’il était possible de concilier stabilité monétaire et soutien à la croissance économique.
Sa politique a inspiré d’autres banques centrales, telles que la Réserve Fédérale américaine, qui ont adopté des mesures similaires pour stimuler leurs économies.
Néanmoins, le défi de la normalisation de la politique monétaire après une longue période de taux bas demeure, d’autant plus dans un contexte de retour de l’inflation.
L’intégration et l’innovation
Pour Draghi, il ne suffit pas de stabiliser la monnaie européenne ; il faut s’attaquer aux racines du retard économique du continent, en particulier dans les domaines de l’innovation et de la compétitivité. Dans son rapport sur la compétitivité remis à la Commission européenne en septembre 2024, il propose un ensemble de mesures pour dynamiser l’innovation, améliorer le financement des projets à haut risque et tirer parti de la taille du marché européen.
L’une des principales faiblesses de l’Europe réside dans la fragmentation de ses marchés des capitaux. Contrairement aux États-Unis, où les investissements en capital-risque et les financements non bancaires jouent un rôle prépondérant dans le développement des start-ups, l’Europe pâtit de régulations disparates qui entravent la croissance.
Pour Draghi, harmoniser les règles en matière d’insolvabilité, et créer une autorité de supervision des marchés de capitaux, similaire à la Securities and Exchange Commission (SEC) américaine, sont des étapes cruciales pour libérer le potentiel économique du continent.
En outre, il prône une stratégie européenne commune en matière de recherche et d’innovation. Il propose la création d’Agences européennes de projets de recherche avancée (ARPA) pour investir dans les technologies de pointe, à l’image de la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency) aux États-Unis. Une telle initiative renforcerait la capacité de l’Europe à innover dans des secteurs stratégiques tels que l’intelligence artificielle, les énergies renouvelables et la santé.
Vers une souveraineté économique
Face aux tensions mondiales croissantes, Draghi plaide pour une plus grande souveraineté économique de l’Europe. Les crises récentes, qu’il s’agisse de la pandémie de COVID-19 ou de la guerre en Ukraine, ont révélé les vulnérabilités de l’Europe en matière d’approvisionnement en énergie et en produits essentiels, soulignant l’importance d’une autonomie accrue.
Pour y parvenir, Draghi propose de mutualiser certains efforts de défense, en intégrant les industries militaires et en développant une politique de défense commune. Cette démarche permettrait de réduire les coûts et de renforcer l’autonomie stratégique du continent face aux grandes puissances.
Cependant, cette proposition se heurte à la désapprobation de certains États membres, réticents à abandonner une part de leur souveraineté en matière de défense.
La question énergétique est également au cœur de la vision de Draghi pour une Europe souveraine. Il insiste sur l’importance d’une transition accélérée vers les énergies renouvelables, accompagnée d’une réduction de la dépendance aux importations énergétiques. Si l’Union Européenne a déjà entrepris des initiatives ambitieuses avec le Pacte vert, Draghi préconise qu’il faut aller plus loin en renforçant les infrastructures transfrontalières et en investissant massivement dans les technologies propres. Une politique énergétique commune permettrait de mieux résister aux fluctuations des hydrocarbures et d’accroître la sécurité économique.
La Tunisie pourrait bénéficier du Pacte vert européen en exploitant les nouvelles opportunités de coopération économique et technologique. Cela lui permettrait non seulement de moderniser son économie, mais aussi de jouer un rôle stratégique dans la transition écologique euro-méditerranéenne.
Les défis structurels
Malgré l’ambition des réformes proposées par Draghi, leur mise en œuvre s’annonce semée d’embûches. Les divergences entre les États membres, notamment entre le Nord et le Sud de l’Europe, compliquent l’adoption d’une politique économique commune. Les pays du Nord, plus frileux à l’idée d’endettement massif, redoutent les conséquences budgétaires de ces réformes, qui nécessiteraient un effort financier équivalent à un nouveau Plan Marshall (750 à 800 milliards d’euros par an).
L’intégration des marchés de capitaux et la défense commune impliquent des transferts de souveraineté que de nombreux gouvernements hésitent à accepter. Ce débat souligne la tension persistante entre l’approfondissement de l’Union et le respect des identités nationales, un dilemme qui a façonné l’Europe depuis ses débuts.
Une voie à tracer
La philosophie économique de Mario Draghi repose sur l’idée de renforcer l’Europe à travers l’intégration, l’innovation et l’autonomie stratégique. Face à une concurrence mondiale accrue et à des défis internes, il propose des réformes ambitieuses visant à surmonter les faiblesses structurelles du continent.
Pour réussir, l’Europe devra dépasser ses divisions internes et faire preuve d’une volonté politique digne des premiers bâtisseurs. Les propositions de Draghi constituent un appel à une action concertée pour garantir que l’Europe puisse non seulement rivaliser avec les grandes puissances, mais aussi protéger son modèle social unique.
L’Europe se trouve à un carrefour historique. Le choix de suivre la voie tracée par Draghi pourrait redéfinir son rôle dans l’économie mondiale et renforcer sa résilience face aux crises futures. Mais ce choix exigera un consensus politique fort pour surmonter les instincts nationaux et embrasser pleinement une vision de l’unité européenne, plus nécessaire que jamais.
Car si l’Europe a su tisser les fils de ses échanges, ériger ses marchés en temples de prospérité, elle n’a pas encore forgé l’âme de ses citoyens. Et pourtant, pour prétendre à une place parmi les puissances du monde, elle devra s’élever au-delà du commerce pour façonner une véritable communauté de destins.
La « théorie du ruissellement » ou la douce illusion
La « théorie du ruissellement » ou la douce illusion
Par
Jamel
BENJEMIA
« La théorie du ruissellement » économique, popularisée en 1932 par l’humoriste américain Will Rogers, se moquait du programme des réductions d’impôts du Président Hoover, en suggérant avec ironie que des cadeaux fiscaux aux plus riches finiraient par profiter à l’ensemble de la population. Plus tard, cette idée fut reprise plus sérieusement par David Stockman, directeur du budget de Ronald Reagan dans les années 1980, qui proposait de réduire les impôts des plus fortunés et des grandes entreprises, espérant que les bénéfices finiraient par se diffuser vers les classes sociales inférieures. Les partisans de cette théorie avancent que la prospérité des plus riches se traduit inéluctablement par des investissements accrus, la création d’emplois et une croissance économique généralisée, faisant du ruissellement un mécanisme naturel de l’économie, où les gains des plus aisés finissent par « ruisseler » vers le reste de la société.
Cependant, cette vision optimiste s’accompagne rarement d’une analyse critique de ses effets concrets. En pratique, les inégalités économiques n’ont cessé de croître, et les données montrent que les gains les plus significatifs ont été captés par une infime minorité. Comme l’indiquait Samir Amin, le modèle actuel semble davantage confirmer que « les riches s’enrichissent et les pauvres s’appauvrissent » plutôt que de prouver la validité de « la théorie du ruissellement ». Les quelques miettes généreuses laissés aux plus pauvres ne suffisent pas à compenser les déséquilibres structurels du système.
Les limites de la théorie du ruissellement
L’une des principales critiques de « la théorie du ruissellement » réside dans le fait qu’elle repose sur une conception simpliste du comportement économique des plus riches. Au lieu de réinvestir massivement leurs gains dans l’économie réelle, une grande partie de leurs richesses est souvent placée dans des actifs financiers, tels que les actions, l’immobilier de luxe ou les œuvres d’art, qui profitent très peu à la majorité de la population. Cette accumulation de richesses sous forme de capital non productif contribue à l’inflation des actifs plutôt qu’à une véritable croissance économique inclusive.
Par ailleurs, les politiques fiscales favorisant les plus riches – comme les baisses d’impôts sur les sociétés et les réductions des impôts sur les gains en capital – ne se traduisent pas nécessairement par des investissements productifs. Les entreprises préfèrent souvent utiliser leurs gains pour racheter leurs propres actions, augmenter les dividendes ou accorder des rémunérations extravagantes aux dirigeants, plutôt que de créer des emplois ou d’améliorer les salaires des travailleurs. Cela conduit à une concentration accrue des richesses, renforçant les disparités économiques au lieu de les atténuer.
Les mécanismes de redistribution supposés par le ruissellement échouent aussi souvent à compenser l’impact des inégalités croissantes. Les salaires des travailleurs les moins qualifiés stagnent, tandis que le coût de la vie – notamment pour le logement, les soins de santé et l’éducation – continue d’augmenter. Les quelques « miettes » qui atteignent les plus démunis s’avèrent insuffisantes pour améliorer substantiellement leur qualité de vie.
Les conséquences sociales
L’aggravation des inégalités économiques entraîne des répercussions sociales profondes. Les plus riches ont non seulement un accès disproportionné aux ressources économiques, mais aussi un pouvoir accru pour influencer les politiques publiques. Les systèmes de santé, d’éducation et de protection sociale, qui pourraient bénéficier à la majorité, sont souvent négligés au profit de mesures qui favorisent les intérêts des élites économiques.
Les inégalités de revenus s’accompagnent alors d’inégalités d’opportunités. Les enfants issus de milieux modestes ont moins de chances d’accéder à une éducation de qualité, ce qui limite leurs perspectives de mobilité sociale. La promesse d’une croissance inclusive, où tous profiteraient du progrès économique, est remise en question. Les sociétés se fragmentent alors davantage, avec une élite prospère et une majorité peinant à suivre le rythme.
Les inégalités de patrimoine se répercutent également sur l’accès aux services essentiels. Les disparités dans le système de santé, par exemple, s’accentuent lorsque les plus pauvres n’ont pas les moyens d’accéder à des soins de qualité, tandis que les plus riches peuvent se permettre les meilleures cliniques privées. Ce fossé se creuse aussi dans le domaine du logement, où les prix élevés dans les grandes villes excluent les classes populaires du marché immobilier, renforçant la ségrégation urbaine.
Quelques miettes, mais pas de véritable partage
Il serait injuste de dire que les pauvres ne bénéficient absolument pas de la croissance économique générée par les riches. Dans certains cas, les investissements réalisés par les entreprises ou les dépenses de consommation des plus fortunés peuvent effectivement créer des emplois et stimuler une activité économique locale. Mais ces effets restent limités, incapables de combler les écarts de richesse substantiels.
Les miettes du ruissellement se manifestent parfois à travers des programmes de responsabilité sociale des entreprises ou la philanthropie, où les riches s’engagent dans des actions caritatives. Toutefois, ces initiatives demeurent insuffisantes face à l’ampleur des inégalités systémiques et ne remplacent pas des politiques publiques ambitieuses de redistribution. Le caractère volontaire de ces démarches laisse également penser qu’il revient à la générosité des plus fortunés de décider ce qu’il convient de « partager » avec les moins chanceux, au lieu de considérer cela comme un droit.
Les données montrent clairement que les sociétés qui adoptent des politiques de redistribution plus importantes, comme les pays nordiques, réussissent mieux à réduire les inégalités tout en maintenant une croissance économique solide. Ces exemples prouvent que la prospérité économique ne dépend pas nécessairement de l’accumulation de richesses par les plus riches, mais peut être renforcée par une distribution plus équitable des fruits de la croissance.
Un cercle vicieux d’inégalités
Le problème de « la théorie du ruissellement » est qu’elle s’accompagne d’un cercle vicieux où les inégalités économiques alimentent d’autres formes d’inégalités. Par exemple, les riches utilisent leur pouvoir économique pour influencer la politique et obtenir des avantages fiscaux ou réglementaires favorables qui consolident leur position dominante. Cela se traduit par une concentration toujours plus grande du capital, laissant moins d’espace aux nouvelles entreprises pour se développer et rivaliser.
L’influence excessive des élites économiques sur les médias contribue également à diffuser l’idée que les inégalités seraient un mal nécessaire pour stimuler l’innovation et la croissance. En glorifiant les « self-made men » et les « titans de l’industrie », on masque souvent les mécanismes structurels qui favorisent la concentration des richesses, tout en minimisant les inégalités croissantes.
Le ruissellement ou la dépendance ?
Si l’on s’en tient à « La théorie du ruissellement », il semble que le système fonctionne parfaitement : les riches s’enrichissent davantage, les inégalités se creusent, et les pauvres reçoivent quelques miettes généreuses. Les élites pourront continuer à affirmer que leurs succès profitent à tous, même si l’accroissement des inégalités suggère le contraire.
Pourquoi changer une formule qui permet aux privilégiés de continuer à prospérer aux dépens de la majorité ? Après tout, les miettes suffisent à calmer les esprits. Le ruissellement semble surtout être une manière élégante de justifier un système économique dans lequel les dés sont pipés en faveur des plus fortunés.
Plutôt que de considérer la croissance comme un phénomène globalement partagé, il serait pertinent de s’inspirer de la théorie sur « le développement inégal » de Samir Amin, qui souligne que le développement des pays centraux se fait au détriment des périphéries. Ainsi, à l’échelle nationale comme internationale, les inégalités persistent et se creusent, révélant les limites du système actuel et la nécessité de repenser la répartition des richesses pour éviter que le ruissellement ne devienne une illusion de justice économique et sociale.
En résumé, « La théorie du ruissellement » c’est l’art de faire croire aux pauvres qu’un système de goutte à goutte de miettes suffira à les nourrir, pendant que les riches festoient à la table du banquet.
À ce propos, le prix Nobel d’économie 2024 ressemble étrangement à un hommage posthume à Samir Amin- l’économiste que l’on n’a jamais jugé digne de ce prestigieux honneur. Pourtant sa théorie sur le « développement inégal » demeure plus pertinente que jamais, contrairement aux visions simplistes de ceux qui rêvent d’un mariage heureux entre démocratie et croissance économique. Il suffit de regarder du côté de la Chine pour voir à quel point ces idées romantiques s’effondrent face à la réalité : un contrexemple cinglant qui ne s’embarrasse guère des fables sur le développement harmonieux à l’occidentale.
La fin des partis classiques, vers un parti confédéral.
La fin des partis classiques, vers un parti confédéral.
Par
Jamel
BENJEMIA
Pendant des décennies, les partis politiques classiques ont façonné l’architecture de la démocratie, articulant la vie publique autour d’idéologies rigides et d’institutions solidement établies. Ce modèle, qui a structuré les débats politiques et les élections, s’est aujourd’hui essoufflé. Dans un monde en perpétuelle transformation, face à des enjeux sociaux, économiques et environnementaux complexes, ces partis peinent à apporter des réponses satisfaisantes. Ils sont souvent déconnectés des attentes des citoyens, enfermés dans leurs querelles idéologiques et internes.
En parallèle, des mouvements citoyens et des initiatives populaires ont vu le jour, cherchant à combler le vide laissé par ces structures vieillissantes. Cependant, ces mouvements, bien que dynamiques et engagés, manquent parfois de l’organisation et de la cohérence nécessaires pour obtenir des résultats durables. C’est dans ce contexte que naît l’idée d’un parti confédéral, un parti capable de réunir la société civile tout en respectant la diversité des opinions et des actions. Ce modèle permettrait de bâtir une structure plus souple, pragmatique et adaptable aux défis contemporains.
Cet article explore comment la transition vers un parti confédéral pourrait être une réponse aux limites des partis traditionnels et offre un espoir nouveau pour les jeunes générations, désireuses de voir un véritable changement.
L’épuisement des partis traditionnels
Les partis politiques, tels que nous les connaissons, ont émergé au XIXe siècle pour structurer la vie démocratique. Leur rôle était de représenter les intérêts des citoyens à travers des idéologies distinctes, offrant ainsi une voix aux différentes strates de la société. Toutefois, au fil du temps, ces structures se sont figées, devenant plus centrées sur elles-mêmes que sur les préoccupations des électeurs.
L’un des signes les plus frappants de cet épuisement est la montée de l’abstention. De plus en plus de citoyens, en particulier parmi les jeunes, choisissent de ne plus participer aux processus électoraux, estimant que les partis ne les représentent plus. Ce phénomène reflète une profonde crise de légitimité. Les débats idéologiques, autrefois sources d’inspiration et de mobilisation, semblent désormais vides de sens pour beaucoup, car ils ne répondent pas aux défis concrets de la vie quotidienne : crise climatique, inégalités sociales, précarité économique, etc.
Par ailleurs, les anciens clivages gauche-droite, qui structuraient autrefois la politique, apparaissent aujourd’hui obsolètes. Les partis traditionnels peinent à s’adapter à une réalité où les priorités des citoyens sont plus transversales et complexes. Leurs réponses sont souvent inadaptées ou insuffisantes, et les électeurs se détournent vers d’autres formes d’engagement.
L’essor des mouvements citoyens
En réponse à cette crise des partis traditionnels, les mouvements citoyens ont gagné en importance. Ces mouvements, souvent nés sur le terrain, loin des institutions politiques, sont portés par des causes spécifiques : la justice sociale, la lutte contre le réchauffement climatique, la défense des droits des minorités, etc. Ils se distinguent par leur flexibilité, leur horizontalité et leur capacité à mobiliser rapidement autour d’actions concrètes.
Les mouvements pour le climat, les marches féministes, les mobilisations contre les inégalités économiques sont autant d’exemples de la vitalité de ces initiatives. Ce qui attire particulièrement les jeunes dans ces mouvements, c’est leur capacité à donner un sens immédiat à l’engagement. Loin des discours théoriques ou des promesses électorales, ces initiatives offrent des actions concrètes, proches des réalités quotidiennes.
Cependant, bien que ces mouvements aient réussi à sensibiliser et à attirer l’attention sur des enjeux cruciaux, ils manquent souvent de structure et de continuité. Leur décentralisation, bien qu’elle soit une force, peut également être une faiblesse, rendant difficile la coordination et la mise en place de changements à long terme. Il est donc nécessaire de trouver un moyen d’organiser ces forces disparates de manière plus cohérente, tout en conservant leur dynamisme et leur diversité.
La nécessité d’un parti confédéral
Pour que les forces émergentes de la société civile puissent devenir une véritable alternative politique, elles doivent se structurer d’une manière nouvelle. C’est ici qu’intervient l’idée d’un parti confédéral, une structure qui pourrait réunir les différents mouvements, initiatives et associations sous une même bannière, tout en respectant leur autonomie et leur diversité.
Un parti confédéral se distingue par son approche souple et décentralisée. Contrairement aux partis traditionnels, qui imposent souvent une ligne idéologique stricte, un parti confédéral permettrait à ses composantes de conserver leur indépendance tout en coopérant sur des objectifs communs. Ce modèle offre une plateforme où la diversité des opinions et des approches est perçue comme une richesse et non comme un obstacle.
La nécessité d’un tel parti réside dans le besoin de donner un cadre durable et organisé aux initiatives citoyennes. Il ne s’agit pas simplement de remplacer les partis traditionnels par un autre type de structure hiérarchique, mais plutôt de créer un espace où les mouvements peuvent dialoguer, coopérer et mettre en œuvre des solutions concrètes. Le parti confédéral ne serait pas une organisation figée, mais un réseau dynamique, capable de s’adapter aux réalités locales et aux besoins spécifiques de chaque région ou groupe.
Ce parti confédéral permettrait ainsi de répondre aux grands défis de notre époque tout en restant ancré dans la réalité des citoyens. Il pourrait, par exemple, regrouper des initiatives sur la transition écologique, les droits sociaux, ou encore la gouvernance participative, tout en permettant à chaque groupe de poursuivre ses propres actions sur le terrain.
La clé du succès d’un parti confédéral
Le succès d’un parti confédéral repose avant tout sur sa capacité à rester pragmatique et centré sur des résultats concrets. L’un des principaux défauts des partis traditionnels est leur tendance à s’enfermer dans des débats théoriques et idéologiques, loin des préoccupations immédiates des citoyens. Un parti confédéral, en revanche, mettrait l’accent sur des solutions pratiques, des politiques publiques mesurables et des avancées tangibles.
Le pragmatisme n’est pas synonyme de compromis sur les valeurs fondamentales, mais plutôt de l’adaptation de ces valeurs aux réalités contemporaines. Un parti confédéral aurait pour mission de proposer des actions efficaces et applicables, qui apportent un changement réel dans la vie quotidienne des citoyens. Cela pourrait passer, par exemple, par des initiatives concrètes pour la transition écologique, comme la réorientation des subventions agricoles vers des pratiques durables, ou encore la promotion d’une économie circulaire et solidaire.
Une autre clé du succès réside dans la flexibilité. Contrairement aux partis classiques, souvent rigides, un parti confédéral serait capable de s’adapter rapidement aux nouveaux défis, tout en laissant une grande autonomie à ses composantes. Cette flexibilité permettrait de répondre à des crises imprévues, tout en conservant une vision cohérente à long terme.
Enfin, l’ouverture au dialogue et la capacité à rassembler des forces disparates seraient essentielles. Le parti confédéral ne chercherait pas à homogénéiser les idées, mais à créer un espace où différentes perspectives peuvent coexister et s’enrichir mutuellement. C’est en rassemblant ces énergies, en combinant diversité et cohérence, que ce modèle pourrait devenir une véritable alternative aux partis traditionnels.
Un espoir pour la jeunesse
L’épuisement des partis classiques et l’essor des mouvements citoyens nous rappellent que les formes traditionnelles de la politique ne suffisent plus. La nécessité d’un parti confédéral, capable de fédérer la diversité des initiatives tout en restant flexible et pragmatique, apparaît comme une solution viable pour répondre aux défis actuels.
Pour la jeunesse, qui cherche à s’engager dans des actions concrètes et significatives, ce modèle offre un nouvel espoir. Il propose un avenir où l’engagement citoyen ne se limite pas à une appartenance partisane rigide, mais se traduit par une participation active et diversifiée à la construction d’un monde plus juste et plus équitable.
Ainsi, la fin des partis traditionnels ne signifie pas la fin de la politique, mais l’émergence d’une nouvelle ère, où la société civile, organisée en un parti confédéral, peut jouer un rôle central dans la construction du futur. Ce parti incarne la possibilité de réinventer la démocratie, en la rendant plus ouverte, plus inclusive et plus efficace. Pour les jeunes générations, c’est l’occasion de participer à la création d’un monde qui leur ressemble, où la solidarité, la justice sociale et l’innovation sont les moteurs du progrès.