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AfricaGate : Le futur du monde passe par l’Afrique

26 Janvier 2025 , Rédigé par Jamel BENJEMIA / Journal LE TEMPS 26/01/2025 Publié dans #Articles

AfricaGate : 
Le futur du monde passe par l’Afrique.                                   
            
Par

Jamel

BENJEMIA                                
                
                                         


L’analyse de « The Economist », parue le 11 janvier 2025, bien que riche en arguments en faveur d’une « révolution capitaliste » en Afrique, reste prisonnière d’une vision idéologique réductrice. L’Afrique ne peut prospérer en calquant des modèles libéraux standardisés, qui ont creusé les inégalités ailleurs. Au contraire, son avenir repose sur une trajectoire propre : combattre la pauvreté, éradiquer l’analphabétisme et favoriser l’inclusion sociale, tout en misant sur l’éducation, la formation et l’innovation comme leviers d’un développement durable.
Loin des illusions du capitalisme mondial, il est impératif de ne pas bâtir des « cathédrales dans le désert » – ces infrastructures déconnectées des besoins réels des populations – mais de soutenir une nouvelle génération d’entrepreneurs audacieux et visionnaires. En s’appuyant sur un héritage social basé sur la solidarité et les liens communautaires, le continent peut inventer un modèle unique, authentique et inclusif.


Une richesse démographique à valoriser
Avec la population la plus jeune du globe, l’Afrique abritera, d’ici 2030, plus de la moitié des entrants sur le marché du travail mondial. Ce vivier humain exceptionnel pourrait devenir un levier formidable, à condition d’offrir à cette jeunesse les clés de son émancipation : une éducation solide, des soins accessibles et des formations adaptées aux défis d’un monde en constante mutation.
 Aujourd’hui, 60 % des jeunes Africains ne terminent pas leurs études secondaires, et plus de 100 millions d’enfants sont exclus de l’école. Ce gâchis humain et économique est insoutenable. L’histoire montre que la main-d’œuvre qualifiée est la clé de toute révolution industrielle et technologique. Sans un système éducatif robuste et universel, l’Afrique ne pourra pas prétendre à un rôle central dans l’économie mondiale.

 

Eradiquer la pauvreté pour libérer les énergies
Un Africain sur trois survit avec moins de 2 dollars par jour. Cette réalité dramatique n’est pas seulement une tragédie humaine ; elle constitue un frein majeur au développement. Lutter contre la pauvreté n’est pas une option, c’est une nécessité stratégique.
Les gouvernements africains doivent oser des politiques de redistribution ambitieuses : protection sociale renforcée, logements accessibles et l’accès universel à des services essentiels comme l’éducation, l’eau potable, l’électricité et les soins de santé. Des initiatives audacieuses, comme un revenu minimum garanti pour les plus vulnérables, pourraient transformer la donne et réduire les inégalités structurelles.

 

Des ressources africaines au service du continent
Malgré ses richesses naturelles - minerais rares, pétrole, gaz, terres arables, énergie solaire -, l’Afrique reste paradoxalement à la marge des bénéfices qu’elles génèrent. Les revenus issus de l’exploitation des ressources sont souvent dilapidés ou captés par des élites corrompues.
Pour renverser cette tendance, l’Afrique doit réinventer la gestion de ses ressources. La création de fonds souverains, à l’image de ceux du Botswana ou de la Norvège, peut permettre d’investir dans des priorités stratégiques comme l’éducation et les énergies renouvelables.
La valeur du fonds souverain norvégien a doublé en cinq ans, passant de 10 000 milliards de couronnes norvégiennes en 2019 à 20 000 milliards de couronnes à la fin de décembre 2024.
Le « Pula Fund », le fonds souverain du Botswana, est aujourd’hui évalué à 4 milliards de dollars. Alimenté en partie par les revenus tirés de l’exportation des diamants, cet héritage a financé la gratuité de l’éducation publique tout en générant des rendements financiers grâce à des investissements stratégiques.
Parallèlement, il est essentiel de diversifier les économies africaines en développant des industries locales. Exporter des produits transformés, et non des matières brutes, permettrait de créer des emplois et d’augmenter la valeur ajoutée sur place.


Former une jeunesse prête à bâtir 
Au-delà de l’éducation traditionnelle, la formation professionnelle joue un rôle clé dans la transformation sociale et économique. Les secteurs porteurs comme l’agriculture, les énergies renouvelables, les technologies numériques ou la logistique exigent une main-d’œuvre qualifiée. Pourtant, de nombreux jeunes Africains n’ont pas accès à des programmes de formation adaptés à ces opportunités.
Les gouvernements doivent donc établir des partenariats avec le secteur privé et les institutions internationales pour développer des centres de formation technique et professionnelle. Ces programmes doivent être conçus en adéquation avec les besoins réels du marché et intégrer des filières innovantes, comme la maintenance des équipements solaires, la programmation informatique et les applications de l’intelligence artificielle.
En Afrique, l’agriculture emploie encore près de 60 % de la population, mais reste largement sous-productive. En formant les agriculteurs aux techniques modernes et en investissant dans l’irrigation et la mécanisation, le secteur pourrait devenir un moteur de croissance et garantir la sécurité alimentaire du continent.

Des infrastructures pour relier et libérer
Le manque d’infrastructures reste l’un des principaux obstacles au développement africain. Comment espérer développer une industrie compétitive ou attirer des investisseurs étrangers si les routes sont impraticables, si l’eau, ressource vitale, est distribuée au compte-goutte, si l’électricité est intermittente et si les télécommunications sont limitées ?
Il est impératif que les gouvernements africains placent le développement des infrastructures au cœur de leurs priorités. Cela implique d’investir massivement dans les réseaux de transport, les ports, les systèmes électriques, les réseaux numériques, les usines de valorisation énergétique des déchets, les réseaux de dessalement d’eau de mer et de recyclage des eaux usées. Ces projets doivent être pensés à l’échelle nationale et continentale. La mise en œuvre effective de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) nécessitera des corridors de transport transfrontaliers et des réseaux énergétiques interconnectés.
Et pour positionner l’Afrique, comme un acteur clé de la révolution technologique, les pays africains doivent collaborer sur un projet continental ambitieux : L’AfricaGate, une initiative ambitieuse et stratégique en intelligence artificielle, conçue comme la réponse africaine au projet Stargate annoncé par le Président Trump.
L’Afrique regorge d’atouts décisifs. La startup tunisienne InstaDeep, en pleine crise du Covid, a prouvé son excellence en identifiant les virus les plus virulents grâce à l’intelligence artificielle. Avec son énergie solaire abondante, idéale pour alimenter des Data Centers, le continent est parfaitement positionné pour jouer un rôle central dans l’intelligence mondiale.

Changer les mentalités pour réussir
Une révolution sociale nécessite également un profond changement de mentalité. Deux obstacles freinent parfois l’élan collectif en Afrique : la procrastination, qui reporte indéfiniment les actions nécessaires, et une certaine nonchalance teintée de fatalisme, qui banalise l’urgence des défis à relever. Ces attitudes, bien que compréhensibles dans un contexte marqué par des années de désillusion et de crises, doivent être dépassées pour libérer pleinement le potentiel du continent.

Les Africains doivent être encouragés à adopter une culture de l’anticipation et de l’excellence, où chaque effort individuel contribue à un objectif collectif plus grand. Cela passe par la promotion d’un esprit entrepreneurial audacieux et d’une discipline rigoureuse, inspirée par des modèles de réussite locaux et globaux. Des campagnes de sensibilisation, des programmes éducatifs novateurs et l’exemplarité des leaders peuvent contribuer à insuffler cet état d’esprit.

En parallèle, les gouvernements et institutions doivent eux aussi incarner ce changement. Une administration réactive, transparente et moins bureaucratique, associée à des objectifs clairs et mesurables, peut démontrer qu’il est possible de rompre avec l’immobilisme et de créer un élan de transformation durable.

Pour réussir, l’Afrique doit se convaincre que chaque jour perdu à l’inaction est une opportunité gâchée. Adopter une mentalité tournée vers l’action, la persévérance et la responsabilisation collective est la clé pour transformer les défis actuels en moteurs d’un avenir prospère.

 

Une Afrique conquérante
L’Afrique ne trouvera sa pleine mesure qu’en puisant dans ses propres forces, en valorisant ses ressources et en répondant à ses besoins spécifiques. Longtemps assujetti à des modèles importés, souvent mal adaptés, le continent a souffert d’une dépendance qui l’a privé de sa souveraineté économique et sociale. Pourtant, l’histoire nous enseigne que les nations qui prospèrent sont celles qui forgent leur avenir de l’intérieur, en s’appuyant sur la richesse de leur capital humain et matériel.

Il ne s’agit pas de rompre avec le reste du monde, mais de rejeter le rôle de laboratoire pour des solutions standardisées, inadaptées à ses réalités. L’Afrique est à l’aube d’un choix décisif. Si elle parvient à mobiliser sa jeunesse, ses ressources naturelles et son ingéniosité, elle pourra non seulement dépasser les carcans imposés, mais aussi devenir une source d’inspiration pour l’humanité.
La croissance endogène n’est pas un simple objectif : elle est une renaissance, le fruit d’une autonomie réaffirmée et d’un effort collectif ancré dans les valeurs profondes du continent.
Le projet AfricaGate incarne cette aspiration. L’Afrique ne doit plus suivre le train de l’histoire : elle doit en prendre les commandes, forte de sa singularité et de sa vision.

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La théorie des cycles harmoniques : Une vision résonante pour l’économie de demain

19 Janvier 2025 , Rédigé par Jamel BENJEMIA / Journal LE TEMPS 19/01/2025 Publié dans #Articles

La théorie des cycles harmoniques : 

Une vision résonante pour l’économie de demain.                                    
         
     Par

Jamel

BENJEMIA                                
                
                             


Les théories économiques dominantes, héritées des XIXᵉ et XXᵉ siècles, reposent sur des modèles linéaires valorisant une croissance continue et des décisions à court terme. Pourtant, ces approches peinent aujourd’hui à répondre aux défis d’un monde confronté à des crises systémiques — qu’elles soient environnementales, sociales ou technologiques. Cette quête effrénée du rendement immédiat, combinée à une sous-estimation des impacts à long terme, engendre des déséquilibres croissants, menaçant la résilience des systèmes économiques et la durabilité intergénérationnelle.

Face à ces limites, il devient urgent de repenser les fondements de l’économie en y intégrant une vision plus complexe et dynamique. C’est dans ce cadre que s’inscrit ma théorie des cycles harmoniques, une approche innovante qui repose sur la compréhension et la synchronisation des temporalités multiples structurant les activités humaines. Contrairement aux modèles traditionnels, cette théorie met en lumière les interactions entre cycles courts (consommation, innovation rapide), cycles moyens (politiques sectorielles, transitions industrielles) et cycles longs (transformations sociétales et écologiques).

L’objectif de cette théorie est double : anticiper et prévenir les déséquilibres issus d’une mauvaise gestion des cycles, tout en proposant des outils pour harmoniser les flux économiques, sociaux et environnementaux. En s’appuyant sur des concepts issus des sciences systémiques, tels que les boucles rétroactives et les dynamiques fractales, la théorie des cycles harmoniques offre un cadre inédit pour construire une économie résiliente et durable.

Fondements théoriques des cycles

L’histoire des cycles économiques, amorcée au XIXᵉ siècle avec Clément Juglar et ses fluctuations d’affaires (8 à 10 ans), trouve une résonance fascinante dans des récits bien plus anciens. L’interprétation du songe du pharaon par le prophète Youssouf (Joseph selon la Bible), prédisant sept années de vaches grasses suivies de sept années de vaches maigres, révèle une sagesse ancestrale : celle d’une conscience des dynamiques cycliques régissant l’existence. Ce récit mythique, profondément enraciné dans l’histoire humaine, souligne avec éclat l’importance d’une gestion prévoyante des récoltes, notamment celles du blé, pour préserver l’équilibre face aux caprices du temps et des saisons.

Plus récemment, l’économie a approfondi sa compréhension des cycles : les cycles Kitchin (3 à 4 ans), liés aux stocks, Kuznets (15 à 25 ans), influencés par les investissements structurels, et les célèbres cycles Kondratiev (40 à 60 ans), qui traduisent les grandes vagues d’innovation. Joseph Schumpeter a enrichi ces théories en introduisant la notion de « destruction créatrice », montrant que l’innovation, tout en déstabilisant l’existant, est essentielle au renouvellement.

Cependant, ces approches fragmentent souvent l’analyse, en privilégiant les variables économiques et en négligeant les interactions complexes avec la société et l’environnement. Aujourd’hui, face aux crises climatiques, sociales et économiques, ces limites imposent une vision élargie.

Ma théorie des cycles harmoniques apporte une réponse novatrice en intégrant des temporalités multiples et interconnectées. Elle distingue trois niveaux : 
Les cycles courts : influencés par les dynamiques des marchés et les comportements individuels. 
Les cycles moyens : guidés par les transitions sectorielles.
Les cycles longs : porteurs de transformations sociétales et écologiques.

 En synchronisant ces dimensions, la théorie propose une économie où chaque cycle soutient l’autre, réduisant les tensions systémiques et favorisant une trajectoire résiliente.

Ainsi, cette approche systémique éclaire les choix stratégiques, redéfinit les priorités politiques et souligne l’urgence d’une circularité temporelle, en résonance avec les enseignements intemporels.


Les trois niveaux de la circularité temporelle

Ma théorie des cycles harmoniques analyse les activités économiques comme des phénomènes rythmiques structurés autour de trois échelles interconnectées : le micro, le méso et le macro. Ces niveaux, aux temporalités distinctes mais interdépendantes, doivent être synchronisés pour garantir une économie résiliente et durable.

1. Micro-économie : Harmoniser les cycles individuels

Au niveau micro, les cycles courts influencent les comportements des entreprises et des consommateurs. L’innovation rapide et la consommation instantanée répondent aux pressions immédiates, mais engendrent des externalités négatives. Intégrer les principes de l’économie circulaire, comme concevoir des produits réutilisables ou recyclables, convertit ces dynamiques destructrices en boucles vertueuses, incitant immédiatement les acteurs économiques à assumer leurs responsabilités.


2. Méso-économie : Respecter les dynamiques sectorielles


Chaque secteur économique suit des temporalités spécifiques : l’agriculture dépend des cycles saisonniers, l’industrie des rythmes technologiques. Ces particularités dictent des politiques adaptées, comme aligner les investissements dans les énergies renouvelables avec les besoins fluctuants des consommateurs. En intégrant ces rythmes, la circularité temporelle améliore la coordination et la durabilité sectorielle.

3. Macro-économie : Intégrer les cycles longs
Les cycles longs façonnent les transformations profondes à l’échelle globale, telles que les transitions écologiques ou les révolutions technologiques. Ils nécessitent une vision stratégique anticipant les enjeux sur plusieurs décennies. Par exemple, préserver les écosystèmes ou développer des infrastructures résilientes implique de planifier au-delà des horizons économiques ou politiques traditionnels.

En reliant ces trois niveaux, la théorie des cycles harmoniques dépasse l’approche fragmentée de l’économie, proposant une vision intégrée où les déséquilibres systémiques deviennent des opportunités d’équilibre durable

Une méthodologie pour synchroniser les cycles

L’application de la théorie des cycles harmoniques repose sur une démarche rigoureuse visant à analyser, anticiper et harmoniser les temporalités économiques. Cette approche s’articule autour de trois axes méthodologiques interconnectés : l’identification des déséquilibres cycliques, la mise en œuvre de stratégies de resynchronisation, et la conception d’indicateurs multidimensionnels adaptés.

1. Analyse des déséquilibres cycliques

La première étape consiste à cartographier les cycles économiques et leurs interactions. Les cycles courts (comme les fluctuations de la demande), moyens (tels que les transformations sectorielles) et longs (par exemple les transitions énergétiques) doivent être étudiés à partir de données quantitatives et qualitatives. Cette analyse révèle les points de friction, qu’il s’agisse d’une surconsommation immédiate compromettant les ressources à long terme ou de politiques publiques inadaptées aux urgences contemporaines. Identifier ces déséquilibres est une condition préalable à toute intervention efficace.

2. Mise en œuvre de stratégies de resynchronisation

Une fois les déséquilibres identifiés, l’objectif est d’aligner les différents cycles pour restaurer leur cohérence. Cela nécessite des mécanismes de rétroaction ciblés :
• À court terme, des incitations fiscales peuvent être introduites pour limiter les externalités négatives, telles que la pollution ou le gaspillage des ressources.
• À moyen terme, les investissements sectoriels doivent être ajustés aux rythmes spécifiques des transformations technologiques ou des évolutions industrielles.
• À long terme, des cadres de coopération internationale, comme les accords climatiques, doivent permettre de définir des trajectoires globales convergentes.

Ces stratégies favorisent une transition fluide entre temporalités et garantissent une meilleure résilience des systèmes économiques.

3. Conception d’indicateurs multidimensionnels

Les indicateurs traditionnels, comme le PIB, ne permettent pas de saisir la complexité des cycles interdépendants. La théorie des cycles harmoniques propose donc de nouveaux outils d’évaluation, tels que :
• Un Indice de Résilience Temporelle (IRT), mesurant la capacité d’un système à maintenir son équilibre dans le temps. (1)
• Un Indice de Synchronisation Cyclique (ISC), évaluant l’alignement entre les cycles courts, moyens et longs, en identifiant les points de friction qui pourraient menacer l’harmonie du système. (2)

Applications concrètes

La théorie des cycles harmoniques offre des solutions stratégiques en synchronisant les temporalités économiques pour relever des défis majeurs tels que la transition énergétique, l’agriculture durable et la finance responsable.

1. Transition énergétique : orchestrer les cycles

La transition énergétique illustre l’harmonie nécessaire entre actions immédiates (efficacité énergétique), déploiements à moyen terme (infrastructures renouvelables) et visions intergénérationnelles (préservation des ressources). Le Pacte Vert européen montre comment cette coordination garantit une transformation fluide et durable.

2. Agriculture durable : rythmer l’équilibre naturel

L’agriculture repose intrinsèquement sur des cycles saisonniers, qui doivent être intégrés à des perspectives à plus long terme. À court terme, les rotations de cultures et les pratiques d’irrigation améliorent la productivité. Sur le moyen et long terme, des approches comme l’agroécologie ou l’agriculture régénérative visent à préserver la fertilité des sols, à régénérer les écosystèmes et à gérer durablement les ressources en eau. En adoptant une gestion cyclique des ressources, il devient possible de renforcer la résilience alimentaire tout en limitant les impacts environnementaux.

3. Finance responsable : aligner court terme et long terme

Le domaine financier, souvent dominé par une vision à court-terme, peut tirer parti des principes de la circularité temporelle. Les obligations vertes (« green bonds »), par exemple, mobilisent des financements immédiats pour des projets environnementaux dont les bénéfices se manifestent sur plusieurs décennies. Par ailleurs, les fonds d’investissement pourraient adopter des indicateurs de synchronisation cyclique pour évaluer leurs impacts intergénérationnels. Une telle perspective encourage une finance alignée sur des objectifs de durabilité et de résilience.

Ces études de cas montrent que l’application des principes de la circularité temporelle permet de transformer les déséquilibres cycliques en leviers stratégiques pour une économie plus équilibrée et durable.

Vers une économie symphonique 


L’économie, à l’image d’un écosystème vivant, est un jeu subtil de temporalités où les cycles s’entrelacent, se répondent et façonnent le devenir collectif. Pourtant, la pensée économique dominante a souvent réduit ces dynamiques à des trajectoires linéaires, guidées par une quête illusoire de croissance continue. Ma théorie des cycles harmoniques invite à dépasser cette vision réductrice pour adopter une perspective plus globale et nuancée, où les cycles courts, moyens et longs se conjuguent en une harmonie essentielle.

Ma théorie dépasse le simple rôle d’un outil destiné à prévenir les crises. Elle ne se limite pas non plus à l’optimisation des mécanismes économiques existants. Elle propose de repenser les fondements de l’économie, en réconciliant les besoins immédiats des marchés avec les transformations profondes et lentes des sociétés et des écosystèmes. Harmoniser ces temporalités, c’est bâtir une économie qui ne soit plus un simple vecteur de performance, mais un véritable vecteur d’équilibre entre innovation et préservation, entre exploitation et régénération.

Face aux défis contemporains — crise climatique, mutations technologiques, fractures sociales, tensions sur les chaînes d’approvisionnement, Intelligence Artificielle —, la théorie des cycles harmoniques offre une vision qui dépasse la gestion réactive. Elle propose une approche proactive, capable de discerner les rythmes sous-jacents qui animent les transformations et de guider les décideurs vers des politiques qui ne divisent pas, mais relient. Relier l’urgence et la patience, le court terme et l’intergénérationnel, l’homme et la nature : telle est l’ambition qu’elle porte.

Plus qu’un cadre analytique, ma théorie redéfinit l’économie comme un art de la synchronisation et de l’harmonie. Elle dessine une économie non plus vécue comme une course effrénée, mais comme une partition rythmée, où chaque cycle joue un rôle déterminé, mais dans une synergie d’ensemble. Dans cette démarche, c’est une véritable promesse de pérennité qui émerge, celle d’une humanité capable de se mettre en phase avec les pulsations profondes de notre monde.

 

(1) l'Indice de Résilience temporelle :

La formule de l’Indice de Résilience Temporelle (IRT) peut être interprétée comme une mesure pondérée permettant d’évaluer la capacité d’un système ou d’un actif à maintenir ses performances (ou sa résilience) dans le temps. Voici une explication détaillée des éléments de la formule :

1. Pi  : La performance ou la résilience observée au cours de la période  i . Cela peut représenter :

 La valeur d’un actif financier (ex. rendement d’un portefeuille).

 Un indicateur de stabilité ou de robustesse d’un système.

 Une métrique qualitative ou quantitative spécifique au contexte étudié (par exemple, la qualité de service, un indice de stress, etc.).

2. Ti  : La durée associée à la performance  Pi  pour la période i . Cela peut correspondre :

 À une durée fixe si chaque période  i  a le même poids (ex. quotidien, mensuel, etc.).

 À des durées variables si les périodes sont de tailles différentes.

3. Le numérateur représente la performance pondérée par le temps sur toutes les périodes  n . Les périodes où  Pi  est élevé et  Ti  est long contribuent davantage au total.

4.Le dénominateur est la somme totale des durées. Il normalise le numérateur pour produire une moyenne pondérée.

(2) l'Indice de Synchronisation Cyclique (ISC) :

 ISC= 1-δ/µ
Où :
• δ : Écart-type des cycles étudiés (mesurant leur dispersion).
• µ : Moyenne des temporalités ou des phases des cycles (court, moyen, long).
Interprétation :
• Un ISC proche de 1 indique une forte synchronisation entre les cycles, signe d’un système harmonieux.
• Un ISC faible révèle des décalages ou tensions entre les cycles, nécessitant des ajustements.

 

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L’analyste et l’homme politique : Cartographier les idées, arpenter le réel

12 Janvier 2025 , Rédigé par Jamel BENJEMIA / Journal LE TEMPS 12/01/2025 Publié dans #Articles

L’analyste et l’homme politique :
Cartographier les idées, arpenter le réel.                                    
            
Par

Jamel

BENJEMIA                                
                
                                 

  
Dans l’arène du pouvoir, deux figures se croisent mais fusionnent rarement : l’analyste et l’homme politique. L’un, à distance, scrute les courbes de l’histoire avec la patience d’un astronome, cherchant un ordre secret dans l’infini des données. L’autre, dans l’urgence, avance sur le fil du temps, tel un funambule, pris entre les vents contraires des crises et des attentes populaires. Là où l’analyste est le gardien des idées, l’homme politique devient l’artisan du réel, forgeant sous la pression des événements des décisions qui orientent le destin collectif.
Henry Kissinger incarne cette dualité. Homme d’État, mais aussi fin analyste, il a brillamment exploré cette tension dans son ouvrage « Diplomatie » (Fayard).  L’analyste, selon lui, choisit ses batailles, maîtrise le temps et risque tout au plus un erratum dans un prochain traité. L’homme politique, lui, est jeté dans les flammes de l’histoire, contraint de décider sous pression et de répondre à des défis imposés par des forces qui le dépassent. Bernard Tapie, dans un tout autre registre, résumait cette dissension avec une clarté cinglante : « Entre raconter et faire, il y a une différence notable : celle du risque et de l’erreur. Si je passais mon temps à raconter ce que font les autres, j’aurais toujours raison. »
Ce contraste est bien plus qu’une simple opposition : c’est une danse complexe. L’analyste trace des constellations théoriques, et l’homme politique tente de transformer ces étoiles en routes praticables. Mais cette relation est-elle complémentaire ou conflictuelle ? L’analyste éclaire-t-il ou paralyse-t-il l’action ? Et l’homme politique, en passant à l’acte, trahit-il ou sublime-t-il la réflexion ? À l’heure des incertitudes et des bouleversements profonds, questionner cette dichotomie revient à sonder les fondements mêmes de la gouvernance et de la prise de décision. Entre le penseur et l’acteur, ne se joue rien de moins que notre avenir commun.


 Le champ des possibles et des contraintes

L’analyste et l’homme politique évoluent dans deux territoires séparés par une vallée d’ombres que seuls les événements parviennent parfois à éclairer. L’un évolue dans l’univers de l’abstraction, vaste plaine où chaque problème peut être isolé, scruté, disséqué. Il maîtrise son espace comme un peintre son chevalet, choisissant ses couleurs, effaçant ses erreurs, et reprenant son ouvrage jusqu’à atteindre l’harmonie parfaite. Rien ne presse, car son seul maître est la quête du savoir, un objectif immobile qu’il contemple à loisir.

L’homme politique, en revanche, est pris dans la mêlée. Il n’a ni le loisir de choisir son combat, ni celui de modeler à sa guise les circonstances qui l’entourent. Chaque décision est un pas sur un sol mouvant, où la moindre hésitation peut se transformer en précipice. Là où l’analyste s’autorise l’hypothèse et l’expérimentation, l’homme politique doit composer avec l’imprévu et l’irréversible. Son univers est un théâtre où la scène change à chaque instant, où les spectateurs jugent avant même que le rideau ne tombe.

Ces différences, loin de se limiter à un contraste, dévoilent des logiques intimement complémentaires. Si l’analyste observe les mouvements souterrains de l’histoire, il appartient à l’homme politique d’y réagir avec une intuition aiguë, une sensibilité presque animale. Pourtant, cette complémentarité vacille souvent : l’analyste aspire à un pouvoir rationnel qui le magnifie, tandis que l’homme politique redoute les théories trop lisses, incapables de plier sous le poids du réel.

Ainsi, ces deux figures incarnent des rôles opposés mais indissociables. L’analyste dessine la carte, l’homme politique trace le chemin. Entre eux, le temps lui-même, élastique pour l’un, inflexible pour l’autre, joue le rôle d’arbitre. Mais si leurs terrains diffèrent, c’est dans l’épreuve de la décision que leurs approches s’entrechoquent.


La raison et l’instinct

La décision est l’épreuve ultime où se révèle la différence entre l’analyste et l’homme politique. L’analyste se fie à la raison comme à une boussole infaillible. Il construit son raisonnement sur des bases solides, empilant les faits, ajustant les hypothèses, calibrant chaque conclusion. Dans ce laboratoire de l’esprit, il ne court aucun risque immédiat : une erreur peut toujours être rectifiée, un modèle revisité, une théorie amendée. La quête est intellectuelle, et le jugement porte avant tout sur la rigueur du raisonnement et l’élégance de la démonstration.

L’homme politique, lui, navigue sans cartes précises. La raison, outil indispensable, reste insuffisante pour lui dans la plupart des cas. Dans l’urgence, il se tourne souvent vers l’intuition, cette lumière intérieure qui éclaire là où les certitudes faiblissent. Chaque décision est un pari, engageant à la fois son destin personnel et celui des générations qu’il représente. Tandis que l’analyste suit des sentiers balisés, l’homme politique s’aventure dans les zones d’ombres, où chaque hésitation risque de devenir un écueil.

Et pourtant, l’intuition seule ne saurait suffire. La politique est un art exigeant, qui réclame autant de clairvoyance que de courage. Si l’analyste peut se permettre d’attendre l’évidence, l’homme politique doit anticiper, percevoir l’invisible, faire de l’incertitude une matière première. C’est ici que réside sa grandeur, mais aussi sa tragédie : l’histoire le jugera non pas sur les moyens employés, mais sur les résultats obtenus.

La décision politique n’est ni entièrement rationnelle ni purement instinctive. Elle relève d’une alchimie délicate entre lucidité et intuition, où l’homme politique, dans l’instant décisif, se fait tour à tour stratège et prophète. Un équilibre fragile, sans cesse menacé, mais seul capable de métamorphoser le chaos en ordre.

La mémoire et le jugement du temps

Si l’analyste et l’homme politique diffèrent dans leurs méthodes et leurs horizons, ils partagent une même fatalité : celle d’être jugés. Mais le tribunal devant lequel ils comparaissent n’est pas le même. L’analyste est jugé par ses pairs sur des critères d’exactitude, de profondeur et de logique. Ses erreurs, bien qu’imparables, s’effacent sous le poids d’un nouveau paradigme. Pour lui, l’échec est une étape, une bifurcation dans la longue quête d’un savoir qui se veut infini.

L’homme politique, en revanche, fait face à la justice implacable de l’histoire, qui ne connaît ni appel ni pardon. Ses décisions, une fois actées, échappent à son contrôle. Elles s’inscrivent dans une réalité qu’il ne peut plus modeler, et leurs conséquences s’étendent bien au-delà de son mandat. L’analyste lègue des idées, abstraites et perfectibles, tandis que l’homme politique grave dans le réel des traces, glorieuses ou irréparables. Il n’a pas droit à l’oubli. Chaque acte devient une empreinte que le temps amplifie ou efface, mais jamais ne rectifie.

Cependant, ce n’est pas seulement à l’aune de leurs réussites que ces figures sont mesurées, mais aussi par leur capacité à gérer l’inévitable. L’analyste, dans la durée, est reconnu pour avoir interprété les forces souterraines qui sculptent les sociétés. L’homme politique, lui, est jugé sur l’instant, sur sa faculté à dompter l’urgence et à donner à l’imprévisible une forme intelligible.

Ainsi, le temps, qui offre à l’analyste la possibilité de la révision, impose à l’homme politique la lourdeur du définitif. Mais c’est cette asymétrie qui les unit : sans la vision des premiers, les seconds seraient aveugles ; sans l’action des seconds, les premiers resteraient silencieux. Ensemble, ils écrivent, non pas deux histoires parallèles, mais les deux versants d’un même récit.


Une boussole et un cap

L’analyste et l’homme politique incarnent deux facettes essentielles de l’action humaine : la réflexion et la décision. L’un observe le monde depuis les hauteurs de l’abstraction, l’autre s’aventure dans les méandres du réel. Et pourtant, ces deux figures, si différentes dans leurs approches, sont indissociables. L’analyste joue le rôle d’un GPS, dessinant des itinéraires dans l’immensité du possible, tandis que l’homme politique, pilote audacieux ou prudent, doit naviguer au gré des turbulences de l’histoire.

Mais cette complémentarité est fragile. L’homme politique, pris dans le tourbillon de l’urgence, peut s’égarer, céder à l’instinct ou aux pressions immédiates. C’est dans ces moments d’égarement que l’analyste, avec son regard lucide et détaché, devient indispensable. Il ne dirige pas, mais rappelle l’orientation, la trajectoire à suivre. Il est la voix qui murmure à l’oreille du pouvoir, réajustant les écarts, corrigeant les dérives.

Dans un monde où l’incertitude s’impose comme la seule constante, nous avons besoin des deux : la prudence éclairée de l’analyste pour anticiper l’avenir et le courage éclairant de l’homme politique pour le bâtir. Séparés, ils sont imparfaits. Ensemble, ils dessinent les contours d’un équilibre nécessaire entre sagesse et action.
Sans vision, l’action s’égare ; sans action, la vision s’éteint. Ce n’est qu’en conjuguant les deux que le monde avance.

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D’un monde compté à un monde raconté : De la corbeille à Facebook

5 Janvier 2025 , Rédigé par Jamel BENJEMIA / Journal LE TEMPS 05/01/2025 Publié dans #Articles

D’un monde compté à un monde raconté :
De la corbeille à Facebook                                     
            
  Par

Jamel

BENJEMIA                                
                
                                     

« La politique de la France ne se fait pas à la corbeille. » Ainsi s’exprimait l’ancien Président français, le général de Gaulle, refusant de céder aux caprices des marchés financiers, gardiens invisibles mais omniprésents d’un ordre strictement calculé. Des décennies plus tard, le Président tunisien, Kaïs Saïed martèle à son tour une autre mise en garde lucide : « L’État ne se gère pas par Facebook. »  Ces deux réflexions, séparées par le temps mais unies dans leur essence, dessinent un pont entre deux âges : celui d’un univers compté, structuré par les chiffres et les flux, et celui d’un univers raconté, modelé par des récits numériques et des illusions partagées.
Dans le premier univers, les décisions étaient mesurées, soumises aux lois de la gravité économique, inscrites dans les marges des budgets et les indices des places boursières. L’ordre semblait rigide mais compréhensible, porté par une rationalité visible. Dans le second, les récits se substituent aux faits et les vérités se déforment au gré des algorithmes. L’arène du pouvoir se déplace dans des espaces numériques où les émotions surpassent la raison.
Entre ces deux mondes, le basculement est vertigineux. Là où de Gaulle voyait dans la corbeille un levier à surveiller, Saïed, lui, désigne Facebook comme une ombre insaisissable, amplifiant les désirs et les rancunes des foules. Ce n’est plus l’argent qui gouverne seul, mais l’émotion, multipliée à l’infini par des algorithmes aveugles.
Comprendre cette transition, du compté au raconté, n’est pas seulement un exercice académique : c’est une nécessité vitale. Car dans ce récit en perpétuelle réécriture, il nous appartient de discerner ce qui éclaire de ce qui trompe, ce qui construit de ce qui détruit.

De la corbeille aux mirages des marchés
Autrefois, la corbeille, sous les lustres tamisés des Bourses d’antan, était le cœur battant des nations économiques. On y échangeait des promesses et des risques, dans un ballet orchestré par des règles visibles, presque cérémoniales. L’argent y circulait comme un fluide vital, mais contenu dans les veines robustes des institutions. 
Aujourd’hui, cette scène feutrée a cédé sa place à une arène numérique, dématérialisée, où les flux financiers s’échappent comme des grains de sable entre les doigts des États. Les marchés sont devenus des déserts mouvants, balayés par des vents capricieux nommés algorithmes. En un instant, des milliards changent de main, et les nations, tels des caravaniers hésitants, tâtonnent dans une tempête qu’elles ne contrôlent plus.
La financiarisation moderne n’a pas seulement effacé les frontières physiques de l’économie ; elle a dématérialisé le pouvoir. Là où il résidait autrefois dans les capitales et les institutions, il s’est dilué dans des flux insaisissables, traversant continents et fuseaux horaires à la vitesse de la lumière. 
Le danger n’est plus seulement l’effondrement, mais l’effacement des nations elles-mêmes, devenues des spectres incapables de rivaliser avec des forces supranationales. Si la corbeille, autrefois un lieu tangible et animé, possédait un visage bien visible, elle s’est transformée en une ombre furtive, semblable à ces écrans d’aéroport où défilent sans fin des destinations anonymes. Tout est désormais numérique : les échanges se dissolvent dans l’éclat éphémère des pixels. Le trader, jadis figure centrale et charismatique, cède sa place à des algorithmes muets, orchestrant en coulisse une danse de chiffres à une vitesse que l’œil humain ne peut plus suivre.
Et dans ce nouveau paradigme, les États doivent réapprendre à se tenir debout, à ériger des bastions contre les mirages numériques des marchés, afin que la souveraineté, loin de n’être qu’un souvenir, redevienne une réalité tangible.

Facebook, l’écho des ombres

Les réseaux sociaux, Facebook en tête, sont devenus les nouveaux carrefours où s’échangent les illusions et les certitudes, les vérités morcelées et les mensonges éclatants. Ce ne sont plus des agoras ouvertes, mais des labyrinthes d’échos, véritables laboratoires de potins et de commérages. Là où la place publique rassemblait jadis les foules, Facebook communique à travers un mur, transformant les dialogues en monologues amplifiés, jusqu’à ce que la cacophonie devienne la norme.

Ce pouvoir, aussi insaisissable qu’omniprésent, agit comme une rivière souterraine charriant des rancunes et des fantasmes, plutôt que des idées. Sous l’apparente liberté d’expression, une orchestration algorithmique privilégie l’émotion brute à la réflexion profonde. 
Plus insidieusement encore, Facebook est devenu un champ de bataille pour les faussaires de l’opinion. Chaque rumeur virale est une arme, chaque mensonge partagé un poison lent, inoculé dans le corps social jusqu’à paralyser la conscience collective.
Pour les gouvernants, le défi est colossal. Comment administrer lorsque la réalité elle-même vacille sous le poids des illusions numériques ? Comment reconstruire une souveraineté dans un monde où le citoyen perdu dans les méandres d’informations contradictoires, devient l’acteur et la victime de sa propre confusion ?
Facebook, ce miroir noir ne reflète pas ce que nous sommes, mais ce que nous craignons de devenir. Si les États ne parviennent pas à déchiffrer ses codes, le pouvoir leur échappera, tel un sable insaisissable qui glisse entre leurs doigts.


Vers une refondation de la gouvernance

Face à ces vents contraires, l’État, tel un navire balloté par des courants invisibles, doit se réinventer pour ne pas sombrer. Il ne s’agit pas de renier le progrès, mais d’apprendre à l’apprivoiser.
Il faut d’abord repenser les fondations mêmes de l’État, trop souvent fissurées par des promesses vides et des compromis corrosifs. L’administration, parfois comparée à une machine grippée, doit devenir un organisme vivant, souple et réactif, capable de répondre avec diligence aux aspirations d’un peuple qui refuse la passivité. Les lois, semblables à des voiles fatiguées, alourdies parfois par des scories scélérates, doivent être retissées avec un fil nouveau, plus proche des réalités sociales et des besoins économiques. C’est dans cette transformation que réside l’espoir d’un État capable de naviguer avec assurance, même dans les eaux les plus agitées.
Si Facebook se présente comme l’agora moderne, il ne doit pas devenir une place livrée aux mercenaires de la désinformation. Une régulation s’impose, subtile mais ferme, comme un jardinier qui taille les branches sans tuer l’arbre. Les algorithmes, ces nouvelles divinités invisibles, doivent être révélés à la lumière de la transparence et domptés pour qu’ils servent le collectif plutôt que les intérêts d’une poignée de manipulateurs.
Enfin, c’est dans la force du peuple que l’État trouvera son salut. Les citoyens, souvent réduits au silence par le bruit des polémiques et des slogans, doivent redevenir les maîtres d’œuvre de la refondation de la cité. La souveraineté n’est pas une flamme éteinte : elle sommeille, prête à être ravivée dans le cœur des patriotes.

Démystifier pour éclairer

Les forces qui dominent aujourd’hui – de Facebook à Twitter, et bien au-delà – se parent des habits séduisants de la vérité, mais cette vérité est fallacieuse, drapée dans des mensonges finement tissés. Sous couvert de nous informer, ces plateformes nous enrôlent, non pas comme citoyens éclairés, mais comme des soldats d’un combat qui n’est pas le nôtre. Chaque publication virale, chaque « tendance » amplifiée, est un appel à une mobilisation aveugle, à des causes dont les vertus sont plus proclamées qu’éprouvées.
Face à cette mécanique astucieuse, l’éducation, dans son sens le plus noble, reste notre arme la plus puissante pour démystifier ces forces occultes. Elle nous apprend à discerner l’essentiel du superflu, à résister aux manipulations, et à poser les bonnes questions. Car un esprit éveillé ne se laisse pas piéger par les slogans ni emporter par le vent des polémiques stériles.
Démystifier, c’est éclairer. Et éclairer, c’est le premier pas vers la liberté. Rejetons les vérités prêtes à consommer et exigeons la nuance. Car sans le courage de douter, aucune vérité ne saurait être sincère.
Ainsi, choisissons la plume plutôt que l’éclair, la réflexion plutôt que l’instinct, car un esprit libre ne s’emballe pas devant l’image tapageuse ni s’agenouille devant un récit trop parfait. Il explore, questionne et préfère le sentier escarpé des idées aux raccourcis séduisants des évidences, sachant que dans le clair-obscur que l’on distingue les contours du vrai.

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