Reconstruire la Tunisie : Du bitume aux pierres, un pays qui se relève.
Reconstruire la Tunisie :
Du bitume aux pierres, un pays qui se relève.
Par
Jamel
BENJEMIA
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Il y a des silences qui fissurent les nations autant que le temps fend les pierres. En Tunisie, chaque nid-de-poule est une virgule de négligence, chaque mur lézardé une cicatrice de l’oubli. Mais reconstruire, c’est refuser la fatalité. C’est replacer chaque pierre, retisser chaque route, rallumer chaque lumière. Et pourtant, la Tunisie n’est pas un pays en ruine. Elle est une partition inachevée, une symphonie en suspens, attendant que chacun reprenne son instrument pour accorder l’harmonie du progrès.
Les voitures tanguent sur des routes cabossées, les immeubles plient sous le poids du désintérêt, et nous, citoyens, oscillons entre résignation et colère. Mais qu’arriverait-il si, au lieu d’attendre un miracle, nous devenions les chefs d’orchestre de notre propre renaissance ? Si chaque nid-de-poule signalé, chaque mur consolidé, devenait une note ajoutée à cette mélodie de reconstruction ?
Imaginons 24 unités d’intervention, une armée de techniciens réparant l’ossature du pays, et une application, simple et citoyenne, reliant chaque main tendue à une action concrète. Il ne s’agit pas d’un rêve, mais d’une nécessité. Car un pays qui répare ses fondations, c’est un pays qui refuse l’effondrement. C’est un pays qui se remet en marche.
Les routes brisées, fractures du temps et du renoncement
Les routes de Tunisie ne serpentent plus : elles trébuchent. Chaque nid-de-poule est une faille dans le récit national, une brèche où s’engouffrent l’usure et l’oubli. Elles étaient jadis des rubans d’asphalte tendus vers l’horizon, elles ne sont plus que des tapis râpés, déchirés par le poids des années et le silence des pouvoirs publics.
À chaque creux dans la chaussée, c’est un amortisseur qui gémit, un pneu qui s’éventre, un conducteur qui jure. Les taxis tanguent, les camions boitent, et la route, au lieu d’être un fil conducteur du développement, devient une entrave, un labyrinthe semé d’embûches. Ce n’est plus un réseau, c’est une cicatrice géante qui se propage sous nos roues.
Et les conséquences sont lourdes. En 2024, le nombre d’accidents de la route s’élève à 5 687, contre 5 796 en 2023. Un léger recul, mais qui ne saurait masquer le drame : 1 169 décès en 2024, contre 1 216 l’année précédente. Derrière ces chiffres, ce sont des vies brisées, des familles endeuillées, des espoirs fauchés.
Il ne suffit pas d’annoncer des kilomètres de nouvelles routes en construction et de dérouler des plans ambitieux sur le papier. Ce qui compte, ce n’est pas seulement ce qui est bâti, mais ce qui est entretenu. Publier des statistiques sur les routes réparées, sur les routes goudronnées, sur les nids-de-poule relevés, serait un signal clair d’un État qui ne se contente pas de promettre, mais qui agit.
Ces blessures ne sont pas irréversibles. Il suffirait d’un sursaut, d’un plan d’urgence qui ne se contente pas de replâtrer, mais qui soigne en profondeur. Réparer une route, c’est recoudre le tissu économique du pays. C’est rendre aux villes leur fluidité, aux villages leur accessibilité, aux citoyens leur dignité. Car un pays qui laisse ses routes s’effondrer, c’est un pays qui vacille. Et un pays qui les reconstruit, c’est un pays qui avance.
Bâtiments vulnérables, mémoires en péril
Les murs de nos villes parlent. Écoutez-les. Ils chuchotent l’histoire d’un pays qui a grandi trop vite et qui, faute d’entretien, laisse ses fondations vaciller. Chaque fissure dans une école est une promesse d’avenir qui se fendille. Chaque immeuble administratif décrépit est une colonne du service public qui menace de s’effondrer. Chaque balcon prêt à choir est une alerte ignorée, un drame en attente.
Nos centres-villes ressemblent parfois à des vieilles bibliothèques dont les pages se détachent une à une, emportant avec elles les souvenirs de ce qui a été bâti avec espoir. Combien d’hôpitaux, de tribunaux, d’institutions tiennent encore debout par miracle ? Combien de vies seraient épargnées si, au lieu d’attendre l’irréparable, nous choisissions d’agir ?
Rénover, ce n’est pas simplement repeindre les façades pour masquer les plaies. C’est redonner souffle aux pierres, solidité aux structures, confiance aux habitants. Il faut une brigade de la préservation, une légion d’architectes et de bâtisseurs, un programme national qui restaure au lieu de laisser s’effondrer. Car un pays qui ne prend pas soin de ses murs condamne son avenir à l’érosion. Mais un pays qui les relève, pierre après pierre, prouve qu’il refuse la chute.
La Tunisie, un pays à recoudre
Il est des forces qu’on mobilise pour punir et d’autres qu’on élève pour bâtir. La Tunisie n’a pas besoin d’une police de l’environnement qui traque sans réparer, qui sanctionne sans reconstruire. Que vaut une amende dressée face à un mur qui s’effondre ? Que pèse une réprimande face à une route qui se déchire sous les roues fatiguées ? Plutôt que de scruter les failles pour punir, pourquoi ne pas les combler pour bâtir ?
Imaginons un corps d’élite non pas au service de la répression, mais de la réparation. Une force déployée dans chaque gouvernorat, non pour épier et dénoncer, mais pour restaurer et renforcer. Des hommes et des femmes en uniforme, non pour verbaliser, mais pour consolider. Une brigade bâtisseuse, investie d’une mission claire : recoudre la terre et les pierres, réanimer l’asphalte et le béton, ressouder les fondations du pays.
24 unités d’intervention, une par gouvernorat, veillant sur les routes comme sur des artères vitales, sur les bâtiments comme sur des bastions de l’avenir. Un peuple ne se maintient pas debout en dressant des contraventions : il se redresse en érigeant des ponts, en consolidant ses murs, en lissant ses chemins. Faisons de cette force non un œil qui surveille, mais une main qui répare.
L’implication citoyenne
Un pays ne se répare pas d’en haut, il se reconstruit avec ceux qui l’arpentent, qui l’habitent, qui le font vivre. Trop souvent, les citoyens constatent, subissent, râlent – mais restent spectateurs. Il est temps d’inverser cette dynamique, de transformer chaque habitant en acteur du renouveau.
Imaginons une application informatique simple, accessible à tous. Une route cabossée ? Un nid-de-poule béant ? Un bâtiment qui menace de s’effondrer ? En quelques secondes, une photo, une localisation, un signalement envoyé aux équipes de maintenance. Une plateforme interactive où chacun devient les yeux et les oreilles de son quartier, où les autorités locales reçoivent des alertes en temps réel, où le suivi des réparations est transparent, consultable par tous.
Cette implication citoyenne n’est pas une charge, c’est un pouvoir. C’est la possibilité d’exiger, mais surtout de contribuer. Chaque alerte envoyée, chaque problème réparé, c’est une pierre ajoutée à l’édifice du bien commun. Ce n’est plus une question d’État seul, mais d’une nation qui prend en main son propre destin. Car un pays qui donne à ses citoyens les moyens d’agir est un pays qui se dresse au lieu de s’effondrer. Et si nous faisions de la Tunisie un chantier collectif du renouveau ?
La Tunisie qui répare, la Tunisie qui renaît.
Un pays ne meurt pas de ses fissures. Il meurt du silence qui les laisse s’élargir. Mais il renaît à chaque pierre replacée, à chaque route lissée, à chaque mur fortifié. La Tunisie n’est pas un édifice condamné aux ruines du passé, elle est un chantier du possible, un grand livre dont chaque génération écrit une nouvelle page.
Victor Hugo disait : « Il n’y a ni mauvaises herbes, ni mauvais hommes. Il n’y a que de mauvais cultivateurs. » Il en va de même pour une nation : il n’existe pas de fatalité au déclin, seulement l’abandon de ceux qui auraient pu bâtir. Si nous relevons les ponts, réparons les passages, si nous faisons de chaque fissure une promesse de renouveau, alors nous réapprendrons à marcher droit, non plus sur des routes brisées, mais sur des chemins d’avenir.
Que chaque route réhabilitée soit une veine où circule l’espérance. Que chaque mur consolidé soit une colonne qui soutient l’avenir. Car un pays qui répare, c’est un pays qui refuse l’effondrement. Un pays qui bâtit, c’est un pays qui renaît.
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